PETITE REFLEXION ......
J
Le 1 juin 2014
La visite de François Hollande à Rodez à l’occasion de l’ouverture du musée consacré à Pierre Soulages a réveillé en moi un sentiment de dégoût que j’éprouve à chaque fois qu’il est question d’art contemporain. le marché de l’art contemporain La vision selon laquelle le marché de l’art contemporain serait trop sophistiqué pour être accessible à un large public est purement Une toile de Pierre Soulages – typiquement un large panneau monochrome, noir, avec pour seul signe distinctif la trace du pinceau – vaut jusqu’à 5 millions d’euros (1 ) et à 94 ans, cet artiste natif de Rodez continue à peindre tous les jours. Par la grâce d’une poignée de marchands, son atelier est devenu une usine à fric, la « toile » philosophale en quelque sorte. Même les banques centrales ne font pas mieux, avec en prime toute l’oligarchie au grand complet béate d’admiration. Mais où est l’art ?
La vision selon laquelle le marché de l’art contemporain serait trop sophistiqué pour être accessible à un large public n’est pas élitiste, elle est purement et simplement oligarchique. L’art n’y est qu’un alibi et l’objet convoité le signe distinctif d’une indécente richesse et accessoirement un instrument spéculatif, qui plus est détaxé. L’art, le vrai – la série des « Désastres de la guerre » de Goya, par exemple – est l’expression d’une sensibilité féconde et parfois douloureuse, il éclate d’une supériorité naturelle et aimable comme la liberté. Cet art qui ne s’achète pas est par nature ennemi des pouvoirs et de l’argent. Tout à l’opposé, l’admiration vulgaire pour les toiles de Soulages, les bidules de Takashi Murakami ou Jeff Koons (la sculpture en inox Popeye a été vendue par Christie’s New York, en mai 2014, 28,2 millions de dollars, soit 20,7 millions d’euros) n’est qu’adoration de l’argent et consumérisme d’élite. L’artiste devient une marque comme Apple ou Louis Vuitton, on achète sans regarder. Enlevez la signature, et vous n’y porterez pas plus d’attention que devant la porte des chiottes. Si le vide sidéral est un support de réflexion, que l’auteur écrive un livre sur cette réflexion. Un étron accroché au mur d’un musée reste un étron. Une hallucination collective reste une hallucination.
En 1792, Condorcet s’exclamait devant les députés en ces termes : « Tant qu’il y aura des hommes qui n’obéiront pas à leur raison seule, qui recevront leurs opinions d’une opinion étrangère, en vain toutes les chaînes auraient été brisées, le genre humain restera partagé en deux classes : celle des hommes qui raisonnent et celle des hommes qui croient, celle des maîtres et celle des esclaves. »
Esclaves comme ce public qui accepte docilement l’idée qu’il n’est pas assez éduqué ou subtil pour saisir le sens d’un œuvre accrochée au mur d’un musée. C’est le réflexe des sots devant une autorité autoproclamée, les marchands, les critiques mais aussi (hélas !) les élites politiques – en l’occurrence François Hollande – qui n’ont rien à y faire sinon donner des gages de bien-pensance aux puissances de l’argent. Quand on ne pense pas par soi-même, on ne pense pas du tout et on est mûr pour toute sorte de dictature.
En février dernier, à la galerie Sala Murat de Bari (Italie), Anna – une femme de ménage – avait pris pour des déchets une « création artistique » à base de cartons, de journaux et même de miettes de pain… estimée 10.000 €. Tout est parti à la poubelle! Le peuple, l’art et l’argent : tout un symbole.
Notes:
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(1) Peinture, 21 novembre 1959 de Pierre Soulages, vendue par Sotheby’s Londres en juin 2013 pour 4,3 millions de livres (environ 5 millions d’euros). La donation faite par Pierre Soulages et son épouse au musée éponyme de Rodez est, quant à elle, estimée à plus de 100 millions d’euros (NDLR).
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